Le livre que l’on s’apprête à lire est tiré d’une des premières thèses de doctorat consacrées à la littérature francophone de Belgique. Brillamment soutenue à l’Université de Liège en 1971 par Jean-Marie Klinkenberg, cette thèse portait sur le premier chef-d’œuvre de la littérature en question, paru à la toute fin de l’année 1867 : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs. Au cœur de l’enquête se trouve un phénomène qui avait depuis longtemps retenu l’attention de la critique mais qui n’avait jamais été examiné à la loupe : le style archaïsant de Charles De Coster. Loin d’être un ornement pittoresque, à la façon de la « couleur des temps » dont les romantiques aimaient à habiller leur Moyen Âge de convention, c’est ici une nécessité. Pour Klinkenberg, le style de la Légende « n’existe pas indépendamment de l’archaïsme », idée qu’il résu-mera par un aphorisme : « Chez De Coster, le style c’est l’archaïsme. » Le caractère condensé de la formule (qui est bien sûr un clin d’œil au cé-lèbre mot de Buffon) ne doit pas tromper sur la marchandise : il ne s’agit nullement de réduire l’œuvre-maîtresse de De Coster à ce qui pourrait passer pour un procédé, mais bien plutôt de souligner l’omniprésence de l’archaïsme dans la vaste « manœuvre stylistique » qu’est la Légende d’Ulenspiegel. C’est sa place de l’Étoile, le centre à partir duquel rayonnent les autres faits et effets de langue.
Licencié (1967) puis Docteur en Philologie romane (1971), Jean-Marie Klinkenberg, né à Verviers (Belgique) en 1946, enseigne les sciences du langage à l'Université de Liège, et en particulier la rhétorique et la sémiologie. Il y enseigne aussi les littératures francophones (belge et québécoise en particulier). Ses activités se sont orientées dans deux directions: celle de la linguistique et de la sémiotique d'une part, celle des cultures francophones d’autre part.
Dans la première orientation, il a fait sa marque en rénovant la rhétorique, dès la fin des années 1960, au sein de l’équipe interdisciplinaire connue sous le nom de Groupe µ (se prononce « Groupe mu »), et, plus récemment, en contribuant à orienter la sémiotique dans une direction sociale et cognitiviste. Ses travaux de sémiotique et de rhétorique ont été traduits en une quinzaine de langues.
Dans la seconde orientation, il a renouvelé l'approche des lettres belges, en envisageant celles-ci dans une optique sociale et institutionnelle — aisément transposable aux autres cultures francophones qu’il a étudiées, comme la québécoise — et en lançant des programmes interuniversitaires de recherches. Il a ainsi fondé et préside un Centre d’études des lettres francophone de Belgique.
Jean-Marie Klinkenberg est président de l'Association internationale de sémiotique visuelle (International Association for Visual Semiotics).
En savoir plusRipple-marks (1976) est peut-être le plus grave des livres de Muno.
Les chapitres de cet essai, pourtant écrits à divers moments et dans des circonstances variées, sont reliés par un fil conducteur : un regard spirituel sur le monde, qui transcende les expressions poétiques singulières de chacun des auteurs étudiés. Un tel regard est aujourd’hui urgent et nécessaire, et la poésie est à même de le susciter. En effet, elle « offre un démenti calme, clair et ferme à ce qui verrouille le langage humain dans l’étroitesse du matérialisme, le mensonge du mercantilisme ou l’impasse du nihilisme » (Myriam Watthee-Delmotte).