Très ébranlé par ce père mourant, Barnabé me demanda si je pouvais l’attendre et partit à la recherche du rabbin. Me retrouvant seule avec le père, il me fit signe d’approcher. Son regard était d’un bleu profond. J’eus l’impression qu’il était en train de vérifier si son charme agissait toujours. Il me prit la main. Songeant que je serais peut-être la dernière à le voir en vie, je la lui tendis, lui souris et le réconfortai. À mon grand étonnement, il me caressa la main et m’envoya des sourires et des regards charmeurs. En un mot, il me draguait. Barnabé m’avait raconté que c’était un séducteur dans l’âme. Il me le prouvait. Je lui répondis avec un sourire philosophe de dinde improvisée pour la circonstance. Il m’était impossible de lui faire la moindre remarque. Il allait mourir. Soudain, il m’attira vers sa bouche et murmura dans un souffle :
— Comment faites-vous ? Surprise, je lui demandai :
— Mais quoi ?
— Comment faites-vous pour rester avec Lui ?
Bellina Welner-Goldberg est née en 1969 à Bruxelles. Après des études de marketing et de communication, elle s’installe en Israël où elle travaille brièvement comme scénariste pour des publicités et des programmes télévisés. Son métier (marketing et vente) la pousse à voyager de manière intense, ce qui lui permet de rencontrer toute sorte de personnalités et de cultures différentes. De ce « kaléidoscope » du genre humain, elle avait tiré deux nouvelles irrésistibles, Le Spleen ashkénaze, suivi de Le Nombril, aux éditions Samsa en 2020. Dans ce nouveau roman, elle nous revient plus maître que jamais de son humour irrésistible.
Elle vit aujourd’hui entre Bruxelles et Tel-Aviv, où elle se consacre à l’écriture.
En savoir plusRipple-marks (1976) est peut-être le plus grave des livres de Muno.
Les chapitres de cet essai, pourtant écrits à divers moments et dans des circonstances variées, sont reliés par un fil conducteur : un regard spirituel sur le monde, qui transcende les expressions poétiques singulières de chacun des auteurs étudiés. Un tel regard est aujourd’hui urgent et nécessaire, et la poésie est à même de le susciter. En effet, elle « offre un démenti calme, clair et ferme à ce qui verrouille le langage humain dans l’étroitesse du matérialisme, le mensonge du mercantilisme ou l’impasse du nihilisme » (Myriam Watthee-Delmotte).